Darkness Tour

(112 concerts)
 

Circuit

La tournée s’est déroulée d’une traite, commençant le 23 mai 1978 au Sheas’s Buffalo de Buffalo, New York, se poursuivant dans de grandes salles, des théâtres, occasionnellement dans des palais des sports à travers les Etats-Unis, avec également plusieurs retours en arrière, et deux incursions au Canada. Les huit premières soirées ont été jouées avant la sortie de l'album qui a eu lieu le 2 juin. Depuis les grandes villes, villes de second rang, en passant par les villes universitaires, toutes ont été visitées. Quelques shows ont été annulés pour cause de maladie mais ils ont été reprogrammés dans la foulée. La tournée s’est achevée, après 117 concerts, le premier janvier 1979 à Cleveland, au Ohio’s Richfield Coliseum

Après une courte et pénible expérience européenne consécutive à la sortir de « Born to Run » en 1975 et un succès commercial mitigé de Darkness comparé à celui de son prédécesseur, Springsteen n’osa pas s’aventurer hors des USA au cours de cette tournée.

La tournée

Les shows de 1978 étaient plus longs que ceux des tours précédents de Springsteen, en général autour 25 chansons, mais ce n'était pas encore les concerts marathon qui allaient remplir le « River tour » et le « Born in the USA tour ». Tout comme l’étendue du répertoire joué n’était pas celle de la richesse actuelle de celui de Springsteen, sa courte carrière ne lui permettait pas d’offrir en surprise un ancien titre comme ce fut le cas lors du « Reunion tour » ou « The Rising tour ».

Plutôt, le mot qui ressort à presque chaque inventaire des shows de 1978 est « intense ». « Badlands » a souvent ouvert, avec des couplets joués sur un rythme beaucoup plus rapide que dans la version studio, avec un jeu de batterie plus actif, et un Springsteen quasi vociférant les paroles sur un rythme tel qu’il semblait pousser le groupe dans ses derniers retranchements. « Born to Run » vers la fin du concert était également joué à une vitesse insensée. En revanche, d’autres morceaux plus lents tels que « Street of Fire » étaient abordés encore plus lentement avec les lignes d'orgue comme fantomatiques mettant en valeur le chant montant jusqu’au cri Springsteen.

Beaucoup de nouvelles chansons de Springsteen sont apparues. Certaines étaient des titres qui étaient ou allaient rapidement devenir des succès comme « Fire » et « Because the Night ». Deux nouvelles chansons lentes, immédiatement accrochantes et particulièrement efficaces, mettaient à mal la saga familiale : « Independence Day » et le cauchemardesque « Point Blank ». Les deux figureraient plus tard sur « The River » en 1980, tout comme ce serait le cas pour plusieurs autres titres d'abord entendus sporadiquement en 1978.

L’interprétation de ses chansons les plus célèbres comme « Prove it All Night » était particulièrement remarquable. Ce premier single tiré de Darkness fut un échec. Il fut transformé en une épopée d'onze-minutes avec un longue et hurlante intro guitare-piano et un final frénétique orgue-guitare-batterie; cette interprétation allait devenir la préférée des fans et reste la référence des dizaines d’années plus tard. Le final au piano de « Racing in the Streets » était étonnamment-imbriqué dans l'intro piano « Thunder Road ». Sur Born to Run « Backstreets » était déjà un conte épique de six minutes et demi sur la trahison et l’abandon que le critique Greil Marcus avait comparé à L'iliade ; maintenant, la plupart du temps, il était prolongé à onze ou treize minutes par une longue et douce interpolation piano-basée sur l’air connu de « Baby I Remember You », « Little Girl Don’t Cry » ou « Sad Eyes ». Sur quelques enregistrements on entend le public crier d’excitation alors que l’émotion dramatique est à son comble, avant que le tempo n’augmente, et soudain s’arrête, et que le dernier « Hiding on the ba-ack streets » ne vous revienne puissamment. Cet intermède sera employé plus tard comme base pour une partie de « Drive All Night » de The River, mais pour beaucoup de fans, avec cette version 1978 de « Backstreets », Springsteen avait atteint l’apogée de son art.

Tout au long de la tournée, le E Street Band a eu un son puissant mais presque clairsemé, avec la ligne de chaque instrument clairement mise en valeur (avec l’apport de nouveaux membres dans les années 1990 et 2000, le son du groupe allait devenir plus massif mais perdre cette clarté). En particulier, le piano de Roy Bittan était la clef de voûte musicale de plusieurs morceaux.

Naturellement tout le spectacle n’était pas sur ce ton mélancolique. Le troisième morceau joué était presque toujours le tragi-comique « Spirit in the Night », joué avec la complicité de la foule, et à mesure que l’on avançait vers la fin des concerts les choses s’illuminaient considérablement avec l'ensemble « Rosalita (Come Out Tonight) » et des rappels composés du classique titre R&B de Springsteen « Detroit Medley » et d’emprunts au style rétro de James Brown pendant le dansant et festif hymne de Gary U.S. Bonds « Quarter to Three ». Sur scène, Springsteen parle et les histoires deviennent meilleures qu’avant avec celle de sa « foutue guitare », devenue sa marque de fabrique à propos des conflits amers avec son père relevée d’une pointe d’affection (particulièrement quand un membre de famille était présent).

La tournée a également vu Springsteen s’afficher dans des palais des sports pour la première fois (y compris le Madison Square Garden de New York), une évolution qui à mesure qu’elle grandissait lui faisait redouter de perdre le contrôle de son public. Les concerts organisés dans des lieux toujours plus grands, Springsteen allait jouer dans des palais des sports ou parfois des stades pendant les décennies pour venir.

Critique et succès commercial

Selon Brucebase, la plupart des shows de la tournée étaient à guichet fermé ou presque; seulement une poignée d’entre eux eurent un nombre substantiel de sièges vides, dont un soir à Kalamazoo, Michigan où Springsteen a offert de dédommager l’organisateur de toute perte financière. Selon Lynn Goldsmith, la photographe de la tournée et la petite amie d’alors de Springsteen, il y a eu plus que quelques soirées à moitié-pleines, mais le niveau des performances de Springsteen n’a jamais varié, qu’importe combien étaient venus le voir.

Le critique Robert de Hilburn du Los Angeles Times a écrit, « j'ai réalisé la foi je commençais à mettre en Springsteen le jour de décembre 1978 où j'ai conduit 400 milles jusqu’à Tucson, Arizona, pour le voir en concert (pour des raisons personnelles, et non pas par obligations professionnelles). Le show faisait partie d'un court mouvement vers l’ouest qui a évité Los Angeles…. [a] une vague d'émotion est montée en moi pendant le concert de Bruce à Tucson… de voir Springsteen en personne se donner ainsi aussi fort sur scène et écouter la l’éloquence du texte de ses chansons m'a incité à oublier mes doutes et à penser à nouveau à mes propres rêves. »

Lynn Goldsmith dira plus tard que la tournée de1978 était loin du tour de rock stéréotypé, et le comparera à la tournée américaine des Rolling Stones de 1978 qu’elle avait également couverte : « Avec Bruce, pas de drogue, pas d’alcool, de longs soundchecks et de longs concerts. Avec les Stones, pas de soundchecks, plein de fêtes et se tirer de la scène aussi vite que possible pour attraper l’avion privé…. Pendant ce tour, Bruce n’avait pas un rond, une époque. Au lieu de traîner en boîte après les concerts, pour certainement passer le temps il se rabattait sur le flipper ou l’observation du paysage par la vitre arrière de l'autobus. »

Ce qu’il en reste

Les retransmissions radio contribuèrent à promouvoir la réputation de la tournée 1978.

Une des raisons pour laquelle le tour 1978 est aussi présent dans les mémoires, est que plusieurs shows furent diffusés intégralement et en direct sur des radios de rock progressif. Parmi ceux-ci, le concert du 7 juillet au Roxy de Los Angeles, retransmis sur KMET, celui du 9 août à l’Agora Theater de Cleveland diffusé sur WMMS-FM, celui du 19 septembre depuis le Capitol Theatre de Passaic, New Jersey sur WNEW-FM, celui du 30 septembre du Fox Theater d’Atlanta retransmis par près de 20 radios du sud, et celui de Winterland Ballroom de San Francisco le 15 décembre sur KSAN-FM. Ces émissions étaient alors écoutées par un plus large public que celui qui assistait aux concerts, et au fur et à mesure des années les stations ont à nouveau rediffusé subrepticement ces émissions ; beaucoup de bootlegs de haute qualité furent tirés de ces shows..

Une interview réalisée par une agence de radio avec le disc jockey Dave Herman comprenait aussi des extraits live du show du 1er juillet au Berkley Community Theater, dont le long « Prove it All Night » ; ces clips seront également entendus sur des messages publicitaires radiophoniques tels que King Biscuit Flour Hour.

En outre, au début des années 80, une longue vidéo musicale de « Rosalita » a été diffusée par MTV à partir du show du 8 juillet (filmée dans son intégralité) au Veterans Memorial de Phoenix, Arizona. Elle comprenait la présentation du groupe et une séquence d’adorables groupies se ruant sur la scène. Elle restituait le côté énergique et généreux de Springsteen et le E Street Band en concert, et fut en quelque sorte la première rencontre que bien des fans occasionnels ont faite.

Le coffret live 1975-85 de 1986 contenait neuf morceaux choisis dans la tournée de 1978, mais des fans furent généralement déçus par ceux-ci, car l'intermède de « Backstreets » fut coupé, d’autres bavardages et histoires coupés ou remontés ensemble à partir de concerts différents, et le long « Prove it All Night » manquait complètement. En plus, quelques unes des pistes de 1978 ont été doublées avec des réenregistrements faits à la Hit Factory en 1986.

Dès 2006, Jon Landau, le manager de Springsteen évoque la possibilité de sortir un DVD d’un concert intégral filmé au cours de la tournée Darkness pourrait être imminent, suivant ainsi la sortie d’un DVD similaire d’un show de 1975 pour le coffret anniversaire de Born to Run. Après des années d'attente, le coffret The Promise est édité avec des extraits du show de Phoenix et le concert intégral de Houston.

 
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